Lottie
Lottie
Il faisait nuit noire. Bien qu’il fasse très froid Lottie aimait se promener à cette heure indue, bien avant l’aube, dans les allées sableuses du parc, sa veste épaisse fermée jusqu’au menton. Elle sentait que le gel tombait, ses pas ne faisaient déjà plus le même crissement au sol et ses cheveux semblaient se raidir, pourtant le reste du corps et l’âme étaient suffisamment chaud et en alerte pour que cela ne fut pas une souffrance, plutôt une paix fragile qu’elle sentait monter. Les jours à Tulsa, ces derniers temps, avaient été éprouvants.
S’arrêtant un court instant, elle leva les yeux au ciel, celui-ci était étoilé presque à outrance. La buée montant de sa bouche parvenait à peine à en voiler l’éclat. Elle crut voir une étoile filante, énorme. « J’étais stupéfaite » dira-t-elle plus tard aux journalistes. « C’était très beau ». Tout cela lui semblait tellement de belle augure, elle reprit sa marche quand quelque chose vint lui heurter l’épaule gauche, sur l’omoplate, et malgré sa veste épaisse elle sentit précisément l’impact. Son sursaut fut énorme, son cœur bondit, et elle voulut courir, mais ses jambes sciées par la surprise lui firent défaut. La frayeur fut pourtant courte, elle entendit nettement un bruit mat, celui d’un objet tombant et roulant au sol et ce n’était pas bien sûr le bruit d’un homme, ni même celui d’un gros chien, ce n’était pas le son que fait en tombant quelque chose de vivant. Se retournant, elle se mit à chercher dans l’obscurité quelque chose plutôt de métallique, une veille canette. Ses yeux s’arrêtèrent alors sur une masse informe et brune, et s’accroupissant, elle n’y vu qu’un morceau de tôle froissée ou de roche. « Et je crus alors que c’était un morceau d’étoile, que ce morceau descendu du ciel à toute vitesse m’était tombé dessus, et sa matière étrange ne pouvait que me conforter, les étoiles sont faites d’un autre matériaux, d’un autre alliage que la terre… je trouvais cela magnifique et puis terrifiant, les étoiles donc pouvaient tomber ».